Le circuit d'essence
Très simple en apparence, le circuit d’essence de notre Traction recèle toutefois quelques petits pièges et peut se retrouver finalement à la source de pannes bien sournoises dues à son vieillissement.
En effet, comme tout le reste du véhicule, il nécessite un minimum d’entretien que nous allons essayer de définir.
Attention : Il s’agit d’intervenir sur un circuit contenant, en plus ou moins grande quantité, de l’essence hautement inflammable. Nous espérons que vous travaillerez avec le minimum de précautions, de conscience et de discernement qui s’imposent ici, et notamment en présence d’un extincteur digne de ce nom.
Préalablement à toute intervention, nous ferons deux opérations :
1° Observation visuelle attentive de tout le circuit, moteur en marche, afin de détecter d’éventuelles fuites ou suintements, le circuit étant alors en charge.
2° inspection olfactive (mais oui !) de tout le circuit, ne devant présenter aucune odeur d’essence douteuse. C’est un indicateur bien plus précieux et révélateur qu’on ne le croit, et ce n'est pas pour rien que les pétroliers ont aromatisé puissamment, par sécurité, leurs carburants.
Nous cheminerons donc du réservoir au carburateur, tout comme le fait le précieux liquide.
1° Le réservoir :
De 45 Litres pour la frêle 7A ( En réalité seulement 39, voir l'additif en fin d'article !), il a pu contenir jusqu’à 75 litres sur la gloutonne 15 SIX.
De construction métallique sur tous les modèles, il aura traversé les ans avec des fortunes diverses :
En présence de corrosion perforante, le moindre bon sens impose son remplacement, sachant que l’on trouve en dernière solution des reproductions plus ou moins heureuses, en particulier sur les conduits d’évents pas toujours bien faits et débouchés, soyez attentifs.
Si la corrosion, principalement interne, reste modérée il faudra peut-être accepter de se contenter d’un simple traitement anti corrosion, éventuellement suivi d’un traitement destiné à napper les parois internes de résine et d’une bonne peinture anti corrosion externe. Ces traitements sont désormais assez connus, maitrisés et documentés par leurs vendeurs pour ne pas être plus développés ici.
Nombre de tractions roulent encore avec des réservoirs légèrement corrodés intérieurement, avec succès, moyennant la précaution d’un filtre supplémentaire dans le circuit (nous y reviendrons). Là encore, tout est question de mesure et de bon sens : Ne pas paniquer face à un peu de rouille superficielle, comme ne pas s’entêter face à un réservoir « cliniquement mort » et donc peu fiable et très dangereux.
On ne pourra malheureusement contrôler visuellement tout cela que par la goulotte de remplissage et par le puits de jauge et l’orifice du plongeur d’alimentation suivant les versions et les années. La trappe de visite de fond de malle arrière est précieuse pour cela, et un endoscope de mécanicien sera un aide certain.
Astuce : Immerger, près du plongeur d’alimentation, un aimant puissant. La presque totalité des particules de rouille contiennent encore assez de métal toujours sain pour venir se coller à l’aimant : On sera surpris de ce que l’on « ramène » si l’on a pris soin d’attacher l’aimant à un fil de fer très fin pour pouvoir le remonter.
Contrôler scrupuleusement les soudures de la goulotte de remplissage, des départs de tube d’évent, et de l’embase du bouchon de vidange.
Vérifier aussi le bon état du joint du bouchon de remplissage, de la vis/bouchon de vidange et le bon dégagement du trou de mise à l’air libre sur le bouchon de remplissage.
Contrôler le feutre isolant les sangles métalliques de fixation du réservoir, qui ne doivent pas venir frotter directement sur celui-ci, et leur bon état en pensant qu’un réservoir plein est lourd, pratiquement 75 Kgs pour la 15 SIX !
2° Les durites souples :
Si elles ont plus de 5 ans, ou de date inconnue, il sera un minimum de les changer systématiquement sans même réfléchir, en choisissant une durite de qualité en dimension 7 mm intérieur pour assurer un bon serrage sur les conduites rigides de 8mm à l’origine. La durite toilée est un petit « plus » rétro, et les éventuelles inscriptions et marquages contemporains, peu esthétiques, peuvent s’enlever avec un soupçon de diluant cellulosique sur les durites lisses.
Suivant les années, leurs dispositions et présences sont variables :
- Sortie de plongeur de réservoir : Uniquement sur les malles bombées post-52. C’est une sortie coudée, très souvent fendue du fait de sa courbure, provoquant maintes pannes sournoises d’alimentation par prise d’air (Attention aux refabrications douteuses, cuites en quelques mois)
- Entre conduite rigide arrondie sous l’aile arrière gauche et conduite sous caisse (juste en bout du bas de caisse gauche) : Très exposée, il faudra la surveiller fréquemment
- Entre conduite sous caisse et entrée de pompe
- Entre pompe et carburateur : Principalement sur les post-52, il ne faut en aucun cas modifier le trajet qui passe par devant le cache-culbuteurs et tient par une bride sur la vis supérieure du corps de pompe à eau : Ainsi, elle est directement placée dans le flux d’air du ventilateur et se trouve donc judicieusement refroidie pour éviter le vapor-lock (toutefois rarissime avec les essences actuelles).
Les colliers de serrage : Si vous utilisez de la durite conforme à l’origine, c’est-à-dire en 7mm et non en 8mm comme trop souvent, le serrage sera alors suffisant pour assurer une absence de fuites tant sur la partie soumise à aspiration (réservoir à pompe) que sur la partie soumise à refoulement (pompe à carburateur).
Si toutefois on se sent rassuré par l’utilisation de colliers de serrage, éviter absolument les colliers modernes réellement laids et anachroniques sous le capot.
Astuce : enrouler un à deux tours de ruban adhésif toilé sur les extrémités de la durite avant de placer le collier, cela évitera de blesser le caoutchouc au serrage et assure une très belle finition en particulier si vous utilisez de la durite toilée qui s’effiloche toujours un peu à la coupure.
Protection de la durite et collier ancien, belle finition assurée.
Attention : Il a été observé sur plusieurs voitures, que le rajout d’un collier de serrage sur le tube lisse en entrée de carburateur (principalement les 32 ou 33 SOLEX PBIC) avait une tendance nette à favoriser le dessertissage de ce tube : Surveillez impérativement ce point, il y a un gros risque d’incendie !
Avant-guerre, les durites étaient fréquemment sous gaine tressée métallique, style "TITEFLEX".
On trouve encore de nos jours ce type de fourniture, qu'il vous faudra remonter pour respecter l'aspect d'époque si votre TA en était munie. Elles ont une longévité supérieure aux durites classiques, mais attention à ne pas faire l'impasse sur des changements réguliers également.
3° Les conduites rigides :
On va s'intéresser maintenant aux conduites rigides métalliques, dimensions 6x8 (6mm intérieur 8mm extérieur), qui passent sous l'arche de la roue arrière gauche en arrondi et sous la caisse, soit dans le "V" gauche longitudinal de renfort du plancher, soit maintenue par des pontets vissés sur celui-ci.
D'origine en acier, inutile de préciser que ces conduites ont souvent très mal vieilli et sont devenues des "nids à rouille" en particulier celle placée dans le V qui ont pu s'oxyder à l'abri des regards.
Le minimum est donc de les démonter soigneusement (si placée dans le V, elle ne sort que par l'arrière), les inspecter et les changer sans pitié pour des conduites en cuivre recuit en cas de corrosion. Le cuivre recuit est facile à reformer à la main, aux courbes des anciennes conduites qui serviront de patron. On prendra soin ensuite de les peindre en noir mat ou satiné pour leur éviter un aspect trop clinquant.
Prévoir une longueur suffisante pour la partie sous caisse, afin de lui permettre de dépasser suffisamment à l'avant du V une fois mise en place et ainsi d'y accrocher le segment de durite souple entre sa sortie et la pompe à essence.
4° Les filtres :
Toujours en partant du réservoir vers le carburateur, on trouve divers filtres successifs destinés à alimenter le moteur en essence propre, exempte d'impuretés.
a- Filtre du plongeur:
- sur les modèles "malle plate" c'est un simple tamis entourant le tube plongeur, et solidaire du bouchon de vidange ( 587 047 sur l'illustration du réservoir).
- sur les modèles "malle bombée" c'est un filtre Zénith à lamelles, assez élaboré et très efficace, qui se démonte par la trappe supérieure sur le plancher de malle, et qui est solidaire du plongeur. Le désassembler pour le nettoyer, en dévissant son fond tout simplement.
b- Sur 15 SIX malle plate uniquement: Filtre de fond de malle:
Très joliment placé dans un boitier métallique muni d'un couvercle coulissant, pratiquement en sortie de réservoir, il comporte un tamis métallique et une cuve de décantation destinée à recueillir les impuretés et éventuellement l'eau en suspension dans l'essence (du moins celle qui ne se mélange pas à l'alcool contenu dans le carburant).
c- Filtre de pompe:
Suivant les différents modèles de pompes montées au fil des ans sur les TA, la disposition change, mais on retrouve toujours un filtre en tamis métallique, et une cuve de décantation, soit placée séparément en amont de la pompe, soit intégrée à celle-ci via une chambre interne (sur la SEV 34 par exemple). Le nettoyage se fait par démontage de la cloche en verre de la cuve ou de la pompe.
d- Filtre en entrée de carburateur:
Suivant le type de raccord, il est soit situé autour de la vis creuse du raccord banjo, soit sur les SOLEX PBIC, sous le tube d'alimentation, accessible par un écrou laiton. Ils sont en fine maille métallique et sont censés arrêter les dernières impuretés "oubliées" par les filtres précédents.
On trouve également un petit filtre en amont de la pompe de reprise.
Bien entendu, vous procèderez à leur nettoyage très soigneusement. Avec les essences actuelles, la présence d'impuretés de provenance externe est rare et vous serez plus souvent confronté à des problèmes venant du circuit lui même.
Il sera opportun, en particulier en cas de réservoir un peu oxydé, de rajouter un filtre universel classique, caché derrière le "jambonneau" gauche, avant la pompe à essence et non après, pour protéger les clapets d'aspiration et refoulement qui peuvent se coincer si une impureté empêche leur bonne fermeture (panne d'alimentation très difficile à diagnostiquer). Prenez un filtre transparent pour vérifier régulièrement son niveau d'encrassement et placez le obliquement pour que son angle inférieur serve de cuve de décantation.
5° Les joints:
C'est presque fini ! Il est temps de changer les joints d'embase du plongeur et de platine de jauge, suivant les modèles, de la même manière que les durites caoutchouc. C'est aussi du consommable à vérifier régulièrement.
Attention: Les rondelles sous la tête des vis de fixation de jauge et de plongeur des "malles bombées" sont des rondelles fibre et non métalliques pour assurer l'étanchéité correcte. Si votre Traction sent l'essence dans le coffre, n'en cherchez parfois pas plus loin la cause !
Si votre circuit est équipé de raccords à joints bicôniques ou "olives" de 8mm, ne commettez pas l'erreur de les resserrer trop fort en cas de fuite ou suintement. Si un premier resserrage n'améliore rien, il n'y a guère d'autre solution que de les changer pour des neufs, sinon vous allez finir par tout foirer.
En dépannage: Desserrage, un fil à coudre épais imbibé de pâte à joints en 2 tours devant et derrière le bicône, puis remontage, ça marche souvent...et ça dure parfois.
Les autres joints, fibre ou cuivre, sont classiques et ne méritent pas qu'on s'y attarde plus.
Si vous avez suivi ces étapes, soigneusement, vous voilà avec une Traction munie d'un circuit d'essence "neuf", sûr et fiable. Vous pouvez repartir pour de nombreux kilomètres sans craindre une fuite ou une panne sournoise liée à une prise d'air intempestive.
Pensez simplement à vérifier les filtres de temps en temps.
Additif (sic !):
En 1°, sur la mention de la contenance du réservoir de la 7A, les 45 litres sont relevés à la fois dans la notice d'origine et dans la RTA. De grands connaisseurs nous apportent la rectification, preuve illustrée à l'appui, qu'en fait ce seraient 39 litres puisque la graduation de jauge indique cette mesure pour un réservoir plein.
On trouvera ci-après la photo d'un superbe tableau de bord d'une 7A parfaitement restaurée confirmant ce point. Merci à Yves et Gérard pour cette précision.
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